jeudi 22 mai 2008

Léopold Sédar Senghor (poêtes)




Femme nue, femme noireVétue de ta couleur qui est vie,
de ta forme qui est beautéJ'ai grandi à ton ombre;
la douceur de tes mains bandait mes yeuxEt voilà qu'au coeur de l'Eté et de Midi,Je te découvre, Terre promise,
du haut d'un haut col calcinéEt ta
beauté me foudroie en plein coeur, comme l'éclair d'un aigle

Femme nue, femme obscureFruit mûr à la chair ferme,
sombres extases du vin noir, bouche qui fais lyrique ma boucheSavane aux horizons purs,
savane qui frémis aux caresses ferventes du Vent d'EstTamtam sculpté,
tamtam tendu qui gronde sous les doigts du vainqueurTa voix grave de contralto est le chant spirituel de l'Aimée
Femme noire, femme obscureHuile que ne ride nul souffle, huile calme aux flancs de l'athlète,
aux flancs des princes du MaliGazelle aux attaches célestes, les perles sont étoiles sur la nuit de ta peau.Délices des jeux de l'Esprit, les reflets de l'or ronge ta peau qui se moireA l'ombre de ta chevelure, s'éclaire mon angoisse aux soleils prochains de tes yeux.
Femme nue, femme noireJe chante ta beauté qui passe, forme que je fixe dans l'EternelAvant que le destin jaloux ne te réduise en cendres pour nourrir les racines de la vie.

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